A écouter en lisant : P i a z z o l l a , Libertango (Orchestre National de Jazz)

Dans la pénombre du théâtre, comme le souffle du vent qui s'infiltre à travers une fenêtre, la mécanique de l'orchestre se réveille, à tâtons, et petit à petit, on aperçoit la silhouette d'une mélodie familière. C'est aérien, rebondissant, un brin hésitant. C'est une locomotive qui se met en marche, il y a de la vapeur, des rails, des wagons un peu lourds, et un mécanisme qui s'enclenche. Les quelques saxophones, clarinettes, claviers, percussions, guitares, trouvent leurs marques musicales dans ce vide sonore et tissent un chant, comblent le silence, emplissent la salle d'un son rond et harmonieux. Doucement, un pas après l'autre. C'est du jazz. Et, à l'image de la sonorité du mot, il est comme en suspension dans l'air, comme le point le plus haut de la voltige, il ouvre une brèche dans le fil de notre temporalité, et s'y introduit. Il reprend le célèbre compositeur argentin Astor Piazzolla et recrée, avec tous ces instruments, le son du bandonéon cher à sa musique. Les particules sonores de cet instrument sont divisées autres instruments, comme explosées, dispersées en clarinettes, percussions, guitares, saxophones, pour mieux être réunies. C'est de la chimie, c'est une expérience musicale. Et le tout finit par envelopper l'espace entier. C'est un son libre et chaleureux, qui s'envole, intrigue, hypnotise, module les corps et les esprits. C'est un film sonore qui donne naissance à des images, des ambiances, la vie nocturne d'une ville, des points flous, abstraits, épurés. C'est un portrait musical subjectif qui peint tout une époque, et qui nous y entraîne avec lui, jusqu'à ce point le plus haut de la voltige, jusqu'à cette suspension dans l'air, avant de redescendre brusquement et de l'éteindre, tranquillement, dans la pénombre du théâtre.

Morceau original : Piazzolla - Libertango

Autres pistes : El dia que me quieras // Oblivion // Adios Nonino

A écouter en lisant : P i a z z o l l a ,

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