About the city of S a r a j e v o, Bosnia and

About the city of  S a r a j e v o,  Bosnia and Herzegovina.

                         - August 2012. 

        15 Aout - Arrivée à Sarajevo. Trop fatiguée pour penser, pour savoir quoi en penser. Je me sens complètement déboussolée, je crois que la ville m'a un peu perdue, ou peut être que je suis simplement fatiguée, je ne sais pas. Je ne sais plus rien tout d'un coup. C'est comme si, tout à l'heure, en prenant un taxi à l'aube à travers les collines, en voyant les maisons posées ça et là, en voyant les voitures cabossées et les jardins en friche, en serpentant à travers l'ancien théâtre de ces crimes sans nom, une bombe m'avait explosé au visage, et que maintenant j'étais là, les bras ballants, complètement sourde, sans aucun repère. Tout ce que je savais, tout ce que je croyais être juste, l'ordre que j'aimais donner au monde, tout cela a explosé en milliers de particules et s'est répandu sur le sol poussiéreux. Je suis livrée toute entière à la ville, mais nous sommes étrangères l'une à l'autre. Elle ne veut pas de moi, enfin du moins pas encore, avant je dois la percer, comprendre ses mystères, c'est une serrure et moi je n'ai pas encore la clé. Alors je suis là, les bras ballants, complètement sourde, sans aucun repère. Et je marche dans les rues, sous le soleil brûlant, et je vois les impacts de balle sur les murs, dans le sol, les Roses de Sarajevo, on dirait qu'il y en a aussi sur le visage des gens, dans leurs traits durs et méfiants. Et je vois toutes ces belles choses, les petits vendeurs du quartier historique qui me rappellent les Puces de Paris, les églises, les mosquées et les synagogues qui cohabitent, la place aux pigeons avec tous ces enfants qui courent, les petites boutiques qu'on ne trouve sûrement que dans les Balkans, j'entends l'appel du Muezzin pour le Ramadan et je pense à Istanbul. Et je vois, malgré toutes ces belles choses, que rien n'a été refait, que tout est encore là, à peine recouvert de ciment. Je sais que tout le monde ici ne vit que pour se relever de toutes ces horreurs, mais tout ce que je vois pour le moment c'est cette guerre qui plane encore sur la ville comme l'ombre noire d'un oiseau que tout le monde feint d'ignorer. Moi, étrangère, intruse, je passe devant des bâtiments désaffectés, devant la bibliothèque de la ville incendiée ; je traverse la Sniper Avenue en me forçant presque malgré moi à essayer d'imaginer ce que c'était il y a quinze ans de craindre pour sa vie ici, de ne plus avoir à manger, d'être bloqué là (pour quoi, pour rien) ; je me demande si ce monsieur à ma droite a vécu le siège, si lui aussi a été pris dans le filet de l'horreur du massacre de la soif de la peur - et cette jeune fille de mon âge, était-elle née ? Je veux savoir, mais je ne peux pas m'imaginer. Seule résonne cette phrase, extraite d'un film anglais visionné il y a longtemps, trop longtemps, mais qui se répète dans ma tête comme si c'était la seule chose qui était, peut être, encore vraie : "Sarajevo is bleeding. "

Eleni Karaindrou - Ulysse's gaze

                             Citations extraites du Violoncelliste de Sarajevo, Steven Galloway. 

 

Goran Bregovic - Man from Reno

" There is no way to tell which version of a lie is the truth. Is the real   S a r a j e v o   the one

where people were happy, treated each other well, lived without conflict, or is the real Sarajevo the

one he sees today, where people are tryingto kill each other, where bullets and bombs fly down

from the hills, and the buildings crumble to the ground? "

" Every day he's less and less sure that the   S a r a j e v o    he thinks he remembers ever existed.

It's slipping away from him a little at a time, like water cupped in the palms of his hands,

and when it's gone he wonders what will be left. "

“If this city is to die, it won't be because of the men on the hills, it will be because of

the people in the valley. When they're content to live with death, to become what the men on the

hills want them to be, then   S a r a j e v o   will die.”

 Devotchka - La Llorona 

 Ziveli Orkestar - Festival Welcome in Tziganie

 “Because civilization isn't a thing that you build and then there it is, you have it forever.

It needs to be built constantly, recreated daily. It vanishes far more quickly than he ever would have

thought possible. And if he wishes to live, he must do what he can to prevent the world he wants to live in

from fading away. As long as there's war, life is a preventative measure.”